Le XIXe siècle marque pour l’Europe et pour la Suisse un tournant majeur dans les flux de populations. Alors que l’émigration est très importante au début du siècle, un mouvement parallèle d’immigration se développe durant la même période.
Si la balance migratoire reste négative jusqu’au milieu de la deuxième moitié du XIXe siècle, l’immigration a toujours fait partie du paysage suisse. En effet, l’émigration massive des Suisses, principalement de régions rurales, est en partie contrebalancée par l’arrivée des étrangers sur le territoire pour trois raisons principalement.
Premièrement, certaines régions de la Suisse actuelle ont très tôt été le refuge de populations étrangères qui fuyaient leur pays d’origine pour des raisons religieuses ou politiques. C’est le cas des protestants français qui durent fuir leur pays lors des guerres de religions et de la
Révocation de l’Édit de Nantes en 1685 par Louis XIV.
Deuxièmement, dès le XVIIIe siècle, la Suisse devient l’une des principales destinations d’une migration des membres de la haute société de l’époque pour qui la Suisse représentait l’une des principales destinations de voyage.
Enfin, l’arrivée, bien que tardive, de l’industrialisation associée à un développement des villes provoque l’accroissement des déplacements de population à travers l’Europe. D’abord entre les villes et les campagnes alentour, puis à une échelle internationale, on observe un phénomène de migration économique dû, entre autres, à la recherche de nouvelles opportunités professionnelles.
De plus, en rendant l’achat d’une maison plus simple et le statut de bourgeois (titre porté par les habitants d’une ville) plus accessible dès le premier tier du XIXe siècle, on facilite l’installation des étrangers sur le territoire helvétique, en particulier les ouvriers et artisans qualifiés. C’est ainsi qu’un grand nombre de travailleurs provenant des États ou provinces proches, Allemagne actuelle, France, Savoie, Lombardie ou Piémont, s’installe sur le sol helvétique pour combler le manque de main-d’œuvre locale.
À Lausanne, par exemple, pour soutenir son statut de chef-lieu du canton de Vaud acquis en 1803, on construit, on rénove et on développe la ville. Ce sont les Allemands qui vont fortement participer à ces chantiers et donc à ce développement.
Les cantons étant souverains en matière d’accueil des étrangers, chacun met en place une politique d’accueil plus ou moins ouverte en fonction des sympathies politiques entre les cantons et les étrangers. C’est ainsi qu’à partir de 1830, une série de réformes et des révolutions sont à l’origine de la mise en place de gouvernements plus libéraux, puis démocratiques plus ouverts à l’accueil des étrangers, réfugiés en exil pour des raisons économiques, mais également politiques.
Cette thématique permet ainsi d’aborder un problème composé de plusieurs facteurs avec une partie économique, politique, mais aussi sociale.
Article du Nouvelliste vaudois, numéro de novembre 1835, p. 378. Cet article rédigé pour défendre le système libéral permet d’appréhender la manière dont la Suisse devient, au XIXe siècle, un pays de plus en plus industrialisé et, de fait, un pays d’avenir pour certains travailleurs qui ne parviennent plus à trouver un emploi chez eux.
Compte-rendu du Conseil d’État au sujet de l’année 1834, qui nous permet d’appréhender la question de la gestion des étrangers et la politique d’accueil de la Suisse et plus spécifiquement du canton de Vaud durant les années 1830. Ce document nous laisse voir à quel point la gestion des étrangers, essentiellement allemands durant cette période, prend de l’ampleur.